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| Analyser un roman : modèles | |
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EchO الإدارة العامة
عدد الرسائل : 373 العمر : 36 Localisation : maroc تاريخ التسجيل : 15/05/2006
| موضوع: Analyser un roman : modèles الجمعة 19 مايو - 12:49 | |
| Analyse d’un personnage dans La neige en deuil d’Henri Troyat Après lecture de «La neige en deuil» d’Henri Troyat, nous aborderons l’étude du personnage principal du roman. Nous analyserons plus particulièrement ses attributs et nous nous demanderons si les informations obtenues sur le personnage sont données d’une manière directe ou doivent être devinées, d’une manière indirecte, par le lecteur. Nous terminerons notre analyse par l’observation de son évolution psychologique . Penchons-nous en premier lieu sur les attributs du personnage choisi. Tout d’abord, les attributs fondamentaux d’un individu, à savoir son nom et son prénom, nous sont révélées par le narrateur dès les premières lignes du roman : nous apprenons qu’il s’appelle Isaïe Vaudagne. Sur le plan professionnel, le lecteur est informé de l’abandon de son travail dans une scierie, suite au renvoi de son frère de cette même scierie. Quant à son âge, il nous est révélé dès le début du roman : nous découvrons un homme de cinquante-deux ans, beaucoup plus âgé que son frère Marcellin qui a trente ans. En ce qui concerne le passé d’Isaïe, plusieurs informations nous sont fournies au début du roman. Nous apprenons ainsi que son père fut, comme Isaïe, guide de montagne et qu’il mourut foudroyé lors d’une expédition. Le narrateur nous signale également qu’Isaïe mit au monde son frère Marcellin , que sa mère mourut deux ans plus tard et qu’il s’était chargé de l’éducation de Marcellin. De plus, nous sommes informés sur les expéditions malheureuses auxquelles Isaïe participa, comme guide de montagne, et durant lesquelles plusieurs clients furent tués. Ces accidents de montagne, dont il n’était pas responsable, créèrent en lui un sentiment de culpabilité malgré le fait qu’il fût toujours apprécié comme l’ un des meilleurs guides de montagne («L’un des guides les plus sûrs de la région»). Après l’un de ces accidents, Isaïe dut subir une opération au cerveau. En outre le narrateur nous apprend qu’ Isaïe avait jadis aimé Marie Lavalloud, mais avait eu peur de lui révéler son amour. Le plan physique n’a pas été oublié par le narrateur. En effet Isaïe nous est décrit physiquement de la façon suivante : «Il se dressa de toute sa taille... Grand et maigre, osseux, les hanches plates, le torse large... Ses jambes longues... Il portait haut sa tête sèche, aux traits nets, à la peau fendillée comme un morceau de cuir... Sous les sourcils rongés par le soleil, ses yeux bleus et blonds brillaient d’une joie enfantine». Un homme qui «était robuste et faisait double ouvrage» nous dit encore le narrateur. Sur le plan psychologique, nous percevons les liens très forts qui unissent Isaïe à son frère. Isaïe est très dépendant de son frère («Sa vie n’avait de sens que dirigée et approuvée par Marcellin.»). En effet, une relation profonde l’unit à Marcellin : «Il éprouvait à l’égard de son frère, des sentiments de tendresse discrète, d’adoration craintive que rien ne pouvait rebuter.». Son but était d’ailleurs de rendre son frère heureux. Il éprouve également une grande tendresse pour les animaux dont il s’occupe. Toutefois, son intelligence est moyenne (« Au village, certaines personnes, il le savait, le considéraient comme un simple.»). Seuls les vieux l’écoutent et le respectent encore... C’est un homme simple qui ne se pose pas trop de questions : la vie «est comme elle est» nous dira Isaïe. N’oublions pas son langage qui est peu développé : Isaïe ne possède pas l’intelligence de son frère qui doit parfois lui rappeler le sens de certains mots (par exemple, au mot «acquéreur» qu’Isaïe ne comprend pas, Marcellin devra substituer le mot «vendeur»). Enfin, le dernier attribut intéressant à relever est le décor dans lequel vit Isaïe. Celui-ci habite avec son frère une maison encore agréable en comparaison avec d’autres logis devenus des «vieilles carcasses». Cette maison est située dans un village de montagne isolé (« ce lieu était le point extrême où des hommes avaient osé planté un gîte») et peu peuplé («le village ne comptait plus que dix-huit feux à peine»). En second lieu demandons-nous comment le lecteur perçoit les informations sur le personnage choisi. Ces informations nous sont données le plus souvent d’une façon directe par le narrateur (pensons, par exemple, à toutes les informations qui sont données sur le passé d’Isaïe). D’autres informations nous sont aussi offertes par un autre personnage ( Marcellin dira, par exemple, à Isaïe qu’il est «un propre à rien, avec sa tête fêlée... un imbécile têtu» ). Parfois, c’est le personnage qui nous informe sur lui-même (Isaïe dira à Marcellin qui lui propose une expédition : «Je n’ai plus ce qu’il faut, dans les mains, dans la tête»). D’autre part de nombreuses caractéristiques sur le personnage peuvent être devinées par le lecteur lui-même. En effet, le début du livre nous fournit des détails matériels qui nous permettent de décoder d’une manière différente le personnage : le portrait physique d’Isaïe nous révèle la force imposante qui émane du personnage, la présence de l’almanach, dans la maison, révèle l’attachement d’Isaïe aux souvenirs. Par ailleurs, certaines paroles d’Isaïe nous font deviner son caractère : nous découvrons qu’ Isaïe est un homme attaché à ses racines lorsqu’il refuse de vendre la maison («nous y sommes nés, toi et moi, et le père y est né, et le père du père»), nous percevons l’attachement d’Isaïe à son frère (« Si tu t’en vas, je resterai seul, je périrai seul»). Enfin, plusieurs actions nous donnent des indications sur le tempérament d’Isaïe : le meilleur exemple que l’on puisse trouver à ce propos est le courage sans borne d’ Isaïe pendant l’expédition finale et lors du rapatriement de la jeune Hindoue. Nous terminerons cette analyse par l’étude de l’évolution psychologique d’ Isaïe. Au début du récit nous remarquons qu’ Isaïe ne supporte pas la solitude en l’absence de son frère parti en ville («ll avait plus besoin de Marcellin, que Marcellin n’avait besoin de lui»). Lorsque Marcellin veut quitter le village, s’installer en ville et vendre la maison, Isaïe perçoit le manque d’amour de son frère qui osera lui dire : «Comment veux-tu qu’on t’aime ? Tu n’as plus de raison». Isaïe souffrira profondément de l’attitude de son frère. Mais plus tard Isaïe sera heureux d’apprendre que l’acheteur éventuel signalé par Marcellin ne s’intéresse plus à la maison. Nous percevons ici la grande bonté d’ Isaïe qui remarque la déception de Marcellin («je ne veux pas te voir dans la peine»). Au fond, Isaïe est «balancé entre des sentiments contraires» : devait-il être heureux d’avoir conservé la maison ou malheureux de ne pas pouvoir la vendre ?». Par la suite, Marcellin lui proposera de prendre l’argent des victimes d’un accident d’avion en haute montagne : Isaïe acceptera à contrecoeur. «Ce n’était pas l’amour de l’argent mais l’amour de Marcellin, qui le guidait dans cette aventure». Il voulait aider son frère à «saisir la seconde chance qui lui était offerte» Il pensait à l’agrandissement de la maison, aux animaux qu’il pourrait acheter grâce à l’argent récupéré sur le corps des cadavres. «Mais rien ne prévalait contre sa tristesse et sa crainte» nous dit le narrateur. En fait, l’expédition finale en montagne va complètement transformer Isaïe («il ne se reconnaissait pas dans cet homme fort et décidé»). Le narrateur affirmera d’ailleurs : «C’était comme si un grand souffle d’air pur avait lavé l’intérieur de sa tête». Isaïe se montre plus courageux que Marcellin qui, par peur, voudrait rebrousser chemin. Nous observons la joie intense d’ Isaïe au sommet de la montagne, puis sa déception lorsque Marcellin lui rappelle le but de l’expédition («tout devenait laid et boueux dans sa tête» dira le narrateur en parlant d’Isaïe). Après avoir découvert la femme Hindoue que Marcellin avait voulu abandonner, Isaïe «prit conscience du fait que Marcellin était un inconnu pour lui. Ils ne savaient rien l’un de l’autre. Ils n’avaient jamais vécu ensemble. C’était la première fois qu’ils se rencontraient.» ? la fin du roman, Isaïe, après avoir abandonné son frère, révèle encore une fois sa bonté en ramenant au village la jeune Hindoue : il aura fait passer l’aspect humain avant l’attrait de l’argent. L’analyse qui précède nous a permis de révéler la richesse du personnage que nous avons choisi de traiter. Isaïe est un être complexe, aux sentiments contradictoires. Derrière l’ apparence d’un être simple, nous découvrons un homme qui possède l’intelligence du coeur. | |
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| موضوع: رد: Analyser un roman : modèles الجمعة 19 مايو - 12:51 | |
| La cité de verre de Paul Auster : un roman nouveau Dès la fin du XIXème siècle, le monde littéraire connut un énorme bouleversement concernant la notion de réalisme. Ainsi, plusieurs écrivains comme Marcel Proust, André Gide, Jean-Paul Sartre ou encore André Breton s’élevèrent contre les procédés traditionnels de l’écriture. Ainsi naquit le roman nouveau qui propose « l’aventure d’une écriture » et non plus « l’écriture d’une aventure »… Dans cette lignée, l’écrivain Paul Auster fit paraître sa Trilogie new-yorkaise, dont « Cité de verre », le premier volume, revêt plus d’un caractère propre à cette nouvelle tendance littéraire. En effet, derrière une histoire banale d’un pseudo-détective lancé dans une vaine recherche d’indices, se cache une narration truffée d’éléments révolutionnaires concernant la narration. En ce sens, la finalité de ce roman consiste à dépasser le roman traditionnel et à plonger le lecteur dans un monde dont la réalité s’envole au fil des pages. Nous nous intéresserons donc à la structure originale du roman, qui impliquera une analyse de la notion de temps. Nous poursuivrons notre étude en abordant le concept de personnage. Ensuite, nous aborderons l’évocation de l’espace qui se mêle à une narration transgressant les règles traditionnelles. Nous pourrons aussi déceler quelques procédés narratifs originaux. Dans un premier temps, penchons-nous sur la construction du roman qui, tout en conservant une fiction relativement plausible, nous présente les événements d’une manière surprenante, en s’appuyant sur des informations temporelles approximatives et déroutantes. D’une part, il nous semble opportun de signaler qu’à la dernière page de ce livre, nous comprenons que les événements de l’enquête de Quinn nous sont rapportés par une personne extérieure, un « je » inconnu (un ami du personnage Paul Auster), sur base du cahier rouge de Quinn. Ainsi, notons dès à présent que cette personne devient le traducteur des impressions de Quinn, rôle vivement encouragé par les écrivains du roman nouveau. Relevons déjà ici une belle mise en abyme : un narrateur extérieur nous expose, à travers un roman, des faits décrits par un personnage fictif, Quinn, dans un autre livre (le cahier rouge)… Sans compter la mise en abyme la plus évidente du roman : le romancier Paul Auster évoque la vie d’un personnage, Quinn, qui est lui-même romancier. Poussons le raisonnement encore plus loin, puisque, grâce à un court passage de « Cité de verre », nous découvrons que ce narrateur est sans doute Paul Auster lui-même, auteur de la trilogie new-yorkaise (« ce fut aux alentours de la mi-août que Quinn découvrit qu’il ne pouvait plus tenir. L’auteur a corroboré cette date par des recherches assidues.[…] Mais, pour autant qu’il le sache, après avoir examiné avec soin tous les indices et passé au crible toutes les contradictions apparentes, l’auteur situe en août, entre le 12 et le 25 du mois, les événements ci-après rapportés. »). Cet exemple nous permet de penser que ce narrateur, dans toutes ses adresses au lecteur, emploie soit la première personne (« j’ai suivi le cahier rouge aussi scrupuleusement que j’ai pu… »), soit la troisième personne, comme dans l’exemple repris ci-dessus. En outre, ces explications sur le roman lui-même nous rappellent que le narrateur, à partir de faits écrits par son personnage (Daniel Quinn), les a mis en scène selon sa propre perception. C’est pourquoi, malgré son souci d’exactitude, il nous défend de lier entièrement le récit fictif à la réalité. Paul Auster nous dira d’ailleurs « qu’il est à blâmer pour toute inexactitude ». Bien sûr, nous pouvons compter ce procédé, sans nul doute intentionnel, comme une des nombreuses caractéristiques qui donnent à « Cité de verre » son caractère nouveau. Poursuivons notre étude en établissant une liaison entre la notion de temps et le développement qui précède. Au préalable, notons les nombreux flash-back et les anticipations disséminés tout au long du récit qui dénotent d’une fiction basée sur une remémoration d’événements passés (« 1960 était l’année où Stillman avait enfermé son fils. »). Grâce à ceux-ci, l’auteur parvient à nous plonger au sein d’une histoire dont le début nous est révélé, mais qui ne propose aucun repère temporel pour en situer la fin. Pour ce faire, ce dernier utilise divers procédés comme la réflexion d’un personnage. A ce sujet, le narrateur nous dira de Quinn : « c’était quelque chose qui lui avait toujours plu – cette possibilité de préciser si exactement le premier instant de son existence – et, au fil des ans, il en était venu à célébrer confidentiellement, ce jour-là, son propre anniversaire ». De surcroît, nous soulignons bon nombre de repères temporels imprécis tels que « un jour ou deux », « un certain temps », ou encore « beaucoup de temps passa. Combien exactement, c’est impossible à dire. Des semaines, c’est certain, peut-être même des mois. La relation de cette période n’est pas aussi fournie que l’auteur l’aurait souhaiter ». Ajoutons que ce roman nous donne l’impression que le temps est infini, étant donné que la durée des faits et gestes des protagonistes paraît confuse et fort peu importante aux yeux de l’auteur, position bien sûr tout à fait opposée à la littérature traditionnelle. Effectivement, Paul Auster, révélant de façon non-linéaire cette fiction, détruit toute illusion du réel. D’ailleurs, un exemple de plus à propos de cette caractéristique nous vient à l’esprit lorsque nous lisons la première page de « Cité de verre ». En effet, le narrateur nous offre, dès les premiers mots, une conclusion à la situation qui nous sera présentée tout au long de notre lecture. Ainsi, dès le début, ce dernier réfléchit à propos de la prise de conscience qui devrait être celle de Quinn à la suite des événements (pas encore dévoilés) qui constituent l’ensemble du livre. « Il en conclurait que rien n’est réel sauf le hasard », poursuit le narrateur. En fait, l’auteur nous compare habilement à Quinn. A l’instar de ce « détective » errant sans but à la recherche d’indices qui ne prouveront strictement rien, nous sommes déçus de constater qu’autant de pérégrinations furent vaines. Durant la majeure partie du livre, nous croyions suivre un fil conducteur pour parvenir à une situation finale « logique ». Toutefois, autour de ce fil conducteur, l’enquête de Quinn, dont la chronologie semble respectée, viennent se greffer une série de faits qui détruisent l’idée d’un récit linéaire. Ainsi, la fiction propose des rétrospections lorsque Quinn retranscrit ses activités dans son cahier rouge. Rappelons donc en résumé que le narrateur semble vouloir briser notre idée d’un déroulement chronologique des faits en évoquant des événements qui ont une incidence sur l’enquête de Quinn et qui, pourtant, ne lui sont pas contemporains. Ensuite, il nous semble intéressant de relever quelques aspects du livre concernant les personnages. En premier lieu, nous remarquons qu’un caractère nouveau s’exprime par une certaine ambiguïté quant à l’identité de chacun des personnages de « Cité de verre ». De fait, la fiction ouvre ses portes sur une substitution de rôles : l’écrivain Daniel Quinn se fait passer pour le détective Paul Auster. A partir de cet instant, Quinn « est Paul Auster et, à chaque pas qu’il fait, il essaie de se mouler plus confortablement dans les points d’étranglement de cette transformation ». Apparaît alors au fil des pages un jeu de masques habilement orchestré par l’auteur, étrangement nommé Paul Auster… En effet, il nous faut signaler qu’une grande confusion apparaît entre les divers individus nommés Paul Auster, sans doute au nombre de trois. Tour à tour, nous découvrons un Paul Auster écrivain de « Cité de verre », un Paul Auster personnage-détective intégrant la fiction et un Paul Auster (écrivain ?) narrateur possible d’un récit à la première personne (« dans son appartement, Auster m’a expliqué le peu de choses qu’il savait de Quinn »…). Il se peut donc qu’à un moment précis du livre, lors d’une adresse au lecteur où le pronom « il » désigne Paul Auster, le narrateur se confonde avec l’auteur, pour ne former plus qu’une seule et même personne et ainsi jeter le trouble quant à la véracité de la fiction… De fait, il semble difficile de croire à la notion de réalité dans un récit dont l’auteur devient tout à coup le narrateur pour parler de son rôle d’écrivain (à la troisième personne) et ensuite se confier au lecteur à propos de ses travaux de recherche pour la réalisation de « Cité de verre ». Ainsi, il nous dira à la dernière page : « il y a eu des moments où le texte était difficile à déchiffrer, mais j’ai fait de mon mieux et je me suis abstenu de toute interprétation ». De plus, Paul Auster, en vue de détruire tout à fait l’illusion du réel, ajoutera : « le cahier rouge, évidemment, n’est que la moitié de l’histoire, comme tout lecteur sensible l’aura compris ». Ici, il nous démontre qu’autour du fil conducteur de « Cité de verre », le récit de l’enquête de Quinn, se greffe le « rôle » d’un Paul Auster écrivain et narrateur, qui nous explique ses démarches pour retracer cette même enquête. Nous obtenons alors un roman dont un protagoniste, qui est aussi son auteur, évoque au fil des pages la vie d’un personnage nommé Daniel Quinn. Et cette confusion est renforcée par une notion d’identité plutôt relative à l’intérieur même de cette « biographie » de Quinn. En effet, relevons, par exemple, le cas de Virginia Stillman. La seule preuve officielle de son identité est le chèque qu’elle signe pour Quinn. Or, celui-ci est en bois… Quant à Quinn lui-même, il se prend au « jeu des masques » en se faisant passer pour Henry Dark et Peter Stillman auprès de Stillman senior pour tenter de lui soutirer certaines informations. En outre, il se peut que Quinn figure la réincarnation du petit Stillman claustré lorsqu’il s’enferme dans une petite pièce sombre de l’appartement des Stillman («l’endroit qu’il avait choisi était confortable. Il se dit qu’il resterait là tant qu’il le pourrait. »). Les personnages possèdent donc encore un nom, mais n’ont plus de substance ni de personnalité étant donné que leurs identités se confondent en raison des événements. Ce procédé engendre bien entendu le discrédit des personnages qui ne possèdent plus de caractère propre. Et le summum de ce procédé intervient lorsque le personnage Paul Auster évoque le cas de Cervantès. Selon lui, « Cervantès engage Don Quichotte pour déchiffrer l’histoire de Don Quichotte lui-même ». Cette simple phrase nous offre une formidable mise en abyme puisqu’elle nous rappelle cet imbroglio entre les rôles d’auteur, de narrateur et de personnage… | |
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| موضوع: رد: Analyser un roman : modèles الجمعة 19 مايو - 12:51 | |
| Venons-en à présent à l’observation de l’influence de l’espace sur la fiction et la narration de ce roman. Avant tout, il est primordial d’indiquer que l’auteur nous fait savoir implicitement son désir de lier l’évocation de l’espace à une narration étonnante et moderne. Ainsi, souvenons-nous de ce passage où Quinn découvre que les déplacements de Stillman représentent les lettres de « THE TOWER OF BABEL ». Or nous savons que Peter Stillman junior est l’auteur d’un livre où il décrit le « mythe de Babel », mythe selon lequel la tour de Babel permettrait d’atteindre les cieux. Nous pouvons donc en conclure que Stillman senior lance un dernier appel à son fils avant de se suicider, action qui représente pour lui la construction de sa propre tour de Babel. Toutefois, cette montée vers le ciel s’oppose tout au long du récit à une notion de chute très présente (« Stillman a sauté du pont de Brooklyn. Il paraît qu’il est mort en l’air, avant même de toucher l’eau. »). De plus, Paul Auster évoque ces déplacements dans d’autres contextes. Il parle par exemple de la chute psychologique de Quinn lorsqu’il dit : « il n’avait désormais rien ni personne sur qui retomber sauf lui-même. Il tombait. Ce qu’il ne comprenait pas, cependant, c’était comment dans sa chute il pouvait retomber sur lui-même. ةtait-il possible d’être à la fois en haut et en bas ? ». D’ailleurs, nous observons que l’auteur parvient à exprimer certaines idées par l’usage de l’espace. Ainsi, il pose, au fil des pages, un conflit entre la notion de construction (« la nouvelle Babel commencerait à s’élever et sa forme s’élançant vers les cieux serait le symbole de la résurrection de l’esprit humain. ») et la notion de destruction, exprimée à travers la décadence de Quinn. Remarquons donc que l’espace sert l’idée de contradiction présente au sein de ce livre dans l’identité des personnages, par exemple, ou encore dans la construction du roman qui débute par une conclusion. Poussons maintenant le raisonnement à un degré supérieur en affirmant que l’espace joue le rôle d’un personnage. Effectivement, les protagonistes évoluent au sein du décor new-yorkais qui fait entièrement partie de la fiction et subissent son influence à plusieurs niveaux. Ce décor représente un lien entre Quinn et la personne qu’il prend en filature, Stillman senior. Ainsi, nous avons déjà cité le message laissé par ce dernier grâce à ses déplacements. De plus, le seul endroit où Quinn est capable d’aborder le vieil homme est Riverside Park. En outre, Quinn se confectionne un poste d’observation proche de l’hôtel de Stillman, endroit où il restera plusieurs mois et qui le détruira psychologiquement et physiquement. Soulignons donc qu’au delà du rôle de décor, la ville de New York, la cité de verre, représente une force responsable des réactions des personnages. Elle détruit aussi leurs illusions. De fait, l’immensité de la ville de New York semble être un atout pour Quinn, difficilement repérable. Mais cet espace est en perpétuelle mutation, au point qu’il arrivera à ce dernier de noter ces observations à propos de la vie quotidienne à New York (« il y a les femmes avec leur sac d’épicerie et les hommes avec leur boîte en carton. »). Certain que tous ces détails l’aideront à poursuivre son enquête, Quinn se rend bien vite compte que tout n’est qu’illusion, que toutes ces personnes, y compris Stillman, ne sont que des marionnettes, des girouettes se mouvant au gré du vent (« là où je ne suis pas est l’endroit où je suis moi-même. ») Il s’agit ici par ailleurs de l’idée développée par Auster à travers son titre « Cité de verre ». Il met l’accent sur la transparence de la vie à New York. En tant qu’observateur extérieur, nous pouvons nous imaginer énormément de significations pour tel ou tel mouvement, geste ou regard car rien ne paraît totalement clair et défini. Ainsi, Paul Auster rappelle qu’il est illusoire, aussi bien pour Daniel Quinn que pour le lecteur, de vouloir comprendre les agissements qui sont rapportés au sein de la fiction… Terminons notre étude concernant la « Cité de verre » par une approche des procédés narratifs. Le langage utilisé par Paul Auster nous emmène dans un labyrinthe surprenant. Tout d’abord, nous remarquons une superbe mise en abyme lorsque nous évoquons le cahier rouge que tient Quinn. En effet, toute l’histoire est basée sur ce procédé narratif, car nous nous rendons compte à la fin du récit que le narrateur se base exclusivement sur ce cahier rouge. Ce dernier est la pièce maîtresse du roman et le lecteur s’aperçoit en fait qu’il a lu les écrits de Daniel Quinn recensés dans un cahier retrouvé dans un appartement new-yorkais. En somme, nous pourrions facilement imaginer une couverture totalement rouge si le narrateur n’intervenait pas à la fin du récit (« j'ai suivi le cahier rouge aussi scrupuleusement que j'ai pu... »). Cette figure de style nous bouscule complètement et crée un certain effet de tourbillon qui nous rapproche du héros : Daniel Quinn. Ensuite, le langage qu’utilise Peter Stillman (junior) n’est pas toujours compréhensible, car la syntaxe des phrases n’est pas parfaite (« noir, noir. Pendant neuf ans, disent-ils. Pas même une fenêtre. Pauvre Peter Stillman. Et le boum boum boum. Les collines de caca, les lacs de pipi. »). Ce personnage présente de graves problèmes au niveau du langage, ce qui l’isole du monde extérieur. Cette construction syntaxique, parfois désarticulée, crée encore plus un fossé avec une écriture traditionnelle. Contrairement à l’idée d’un langage saccagé par Stillman junior, nous retrouvons la volonté de perfectionner un langage avec le personnage de P. Stillman senior (« je suis en train d’inventer un nouveau langage »). En fait, le langage est lui-même analysé à travers le récit et nous découvrons deux point de vue différents. D’une part, le langage est placé au second plan et d’autre part, le langage semble être un point central de la vie d’un des personnages. Ensuite, nous remarquons que les mots voguent entre leur sens propre et leur sens figuré. Ainsi, P. Stillman senior dit qu’il trouvera bientôt « la clé de toute une série de découvertes de première importance » et Quinn, intrigué, lui demande : « La clé ? ». Stillman répond en faisant allusion au sens propre d’une clé alors qu’il avait utilisé ce terme au sens figuré. En effet, il aurait dû s’expliquer en parlant d’une solution qu’il trouvera et que l’énigme sera bientôt soulevée. Cette confusion déstabilise encore le lecteur. En conclusion, « Cité de verre » appartient bel et bien à la catégorie des romans nouveaux. En effet, l’intrigue s’effondre avec la mort de Peter Stillman senior et le chèque en bois de Virginia. Les personnages nous perturbent par l’ambiguïté de leurs identités et la narration nous immerge dans un univers hors du commun. Ayant toujours été habitués aux récits traditionnels, nous constatons la richesse d’une nouvelle écriture et d’une fiction troublante. | |
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